Droites dans la vie, condamnées à une mort lente : Des prisonnières politiques privées de soins médicaux dans les prisons iraniennes
En Iran, sous le joug de la domination autoritaire du régime clérical, faire taire la dissidence n’est pas seulement une tactique — c’est un mécanisme profondément enraciné pour maintenir le pouvoir. Arrestations, tortures et longues peines de prison infligées aux défenseur·e·s des droits humains ne sont qu’un aspect de l’immense appareil de répression de l’État, conçu pour écraser toute revendication, même minimale, de dignité et de justice.
Parmi les outils les plus cruels du régime figure le refus systématique de soins médicaux aux prisonnier·e·s politiques — une politique délibérée qui condamne les détenu·e·s à une mort lente et silencieuse.
Pour les femmes emprisonnées, cette cruauté est aggravée. Dans un régime fondé sur la misogynie, les prisonnières politiques subissent une double peine. En plus des lourdes condamnations et d’une surveillance constante, elles endurent une négligence médicale délibérée et calculée, ciblant leur santé et les privant des soins les plus fondamentaux.
À l’approche de la fin du mois de mai, notre attention se tourne vers le sort de plusieurs prisonnières politiques devenues victimes de ces abus systémiques — des femmes dont les corps sont enfermés, mais dont les voix restent farouchement debout. Malgré la maladie, l’enfermement et la pression incessante, elles incarnent encore et toujours l’exigence inébranlable de justice.

Maryam Akbari Monfared : Quinze ans derrière les barreaux, désormais menacée de paralysie
Maryam Akbari Monfared, prisonnière politique déterminée, est actuellement détenue à la prison de Qarchak, à Varamin — l’un des centres de détention les plus infâmes d’Iran — parmi des détenues condamnées pour des crimes violents, en violation flagrante du principe de séparation des prisonniers selon la nature de leur infraction.
Après plus de 15 ans d’emprisonnement sans un seul jour de permission médicale, cette femme de 50 ans souffre désormais de multiples problèmes de santé graves.
Maryam est atteinte de graves lésions à la moelle épinière et d’une discopathie dégénérative, la plaçant en danger imminent de paralysie. Ces derniers mois, elle a connu des engourdissements répétés dans les jambes ainsi qu’un dysfonctionnement des genoux — des symptômes alarmants qui, selon les professionnels de santé, sont des signes d’une atteinte nerveuse et médullaire progressive. Elle a un besoin urgent de soins médicaux spécialisés.
Cinq experts médicaux — dont un neurochirurgien, un orthopédiste et des médecins légistes — ont unanimement recommandé une intervention chirurgicale immédiate à la colonne vertébrale et aux genoux. Pourtant, les autorités pénitentiaires n’ont pris aucune mesure et n’ont apporté aucune réponse officielle aux multiples demandes de traitement formulées par Maryam.
Tout retard dans la prise en charge de sa situation pourrait entraîner des complications irréversibles, notamment la perte de mobilité et l’incontinence urinaire. Bien que son dossier médical ait récemment été transmis de nouveau à l’Organisation de médecine légale, ni Maryam ni son avocat n’ont reçu de réponse.
Outre ses problèmes de colonne vertébrale, Maryam souffre également d’hypothyroïdie et de complications hépatiques.
Elle a terminé sa peine initiale de 15 ans le 11 octobre 2024 — sans bénéficier d’aucun jour de congé — après avoir été transférée en exil à la prison de Semnan. Elle aurait dû être libérée. Pourtant, le 22 octobre, elle a été transférée à la prison de Qarchak sous un nouveau dossier fabriqué de toutes pièces, et condamnée à deux années supplémentaires, une fois de plus placée parmi des détenues de droit commun. Ce développement inquiétant soulève de graves inquiétudes quant à sa sécurité physique et à son bien-être psychologique.

Marzieh Farsi : Atteinte d’un cancer, privée de soins entre les murs d’Evin
La prisonnière politique Marzieh Farsi, 60 ans, lutte pour sa survie à l’intérieur de la prison d’Evin à Téhéran, où elle est privée de soins médicaux adéquats malgré son cancer. Détenue dans le quartier des femmes, elle fait face non seulement à une maladie potentiellement mortelle, mais aussi à la négligence délibérée de l’État.
Marzieh souffre de vertiges persistants et handicapants nécessitant une attention médicale spécialisée. Pourtant, les restrictions sévères de la vie carcérale — et l’absence totale d’accès à des soins appropriés — ont interrompu entièrement son traitement. Bien qu’un médecin de la prison ait prescrit des médicaments pour soulager ses symptômes, les autorités ont refusé de les lui fournir.
Cette négligence médicale intentionnelle a non seulement intensifié ses souffrances, mais a également mis sa vie en danger immédiat. Outre son cancer, les médecins ont également diagnostiqué des signes de complications cardiaques. Pourtant, son état de santé continue de se détériorer, sans traitement, derrière les barreaux.
Née en 1965, mère de deux enfants, Marzieh Farsi est originaire de Téhéran. Elle a été 2023 — à l’occasion de l’anniversaire du soulèvement national de 2022 — quelques mois seulement après sa libération précédente.
Elle a été transférée au quartier 209 de la prison d’Evin, une section contrôlée par le ministère du Renseignement, puis condamnée à 15 ans de prison par le tribunal révolutionnaire de Téhéran, pour baghy (rébellion armée) et liens présumés avec l’Organisation des Moudjahidines du peuple d’Iran (OMPI).

Azar Korvandi : Emprisonnée avec un cœur malade, privée de soins à Evin
Azar Korvandi, prisonnière politique de 63 ans actuellement détenue à la prison d’Evin à Téhéran, souffre de plusieurs pathologies graves, notamment une maladie cardiaque, une rupture du tendon de l’épaule, ainsi que de douleurs articulaires et osseuses chroniques. Bien que des médecins aient recommandé une opération urgente, les autorités pénitentiaires continuent de lui refuser l’accès aux traitements nécessaires.
Atteinte d’un cancer par le passé, Azar a besoin d’un suivi médical régulier et d’examens spécialisés — des soins auxquels elle se voit systématiquement refuser l’accès. Son état de santé s’est tellement détérioré qu’elle n’est plus en mesure d’accomplir des tâches quotidiennes simples, et elle a perdu au moins cinq kilos au mois de mars.
Son besoin de suivi médical est critique, notamment en raison de ses antécédents de cancer, mais l’accès aux soins reste extrêmement limité. Pour aggraver encore sa situation, le ministère du Renseignement — autorité compétente dans son dossier — a refusé d’autoriser même une permission médicale temporaire.
Née en 1962, Azar Korvandi est mariée et mère de deux enfants. Ancienne prisonnière politique dans les années 1980, elle avait alors été emprisonnée alors qu’elle était enceinte. Dans des conditions carcérales extrêmes, elle avait donné naissance à son enfant derrière les barreaux.
Aujourd’hui, des décennies plus tard, Azar est de nouveau emprisonnée — cette fois condamnée à cinq ans de prison pour “collaboration avec l’Organisation des Moudjahidines du peuple d’Iran (OMPI)”.

Zeinab Jalalian : Privée de soins malgré de graves maladies aux yeux, aux reins et au système digestif
Zeinab Jalalian, prisonnière politique kurde de 44 ans condamnée à la prison à vie, est détenue en exil dans des conditions effroyables à la prison de Yazd. Privée d’accès aux soins médicaux spécialisés et incarcérée en violation du principe de séparation des prisonniers selon la nature de leur infraction, sa santé se dégrade jour après jour.
Jalalian souffre de graves troubles rénaux, digestifs et ophtalmologiques. Pourtant, l’obstruction persistante des autorités carcérales l’empêche de recevoir le traitement nécessaire et régulier. Bien qu’elle ait subi des examens médicaux et des imageries fin octobre 2024, les responsables de la prison ont refusé de lui communiquer les résultats, interrompant ainsi tout suivi médical.
En plus de cette négligence, elle est soumise à un isolement renforcé : interdite de toute visite familiale depuis le 22 septembre 2024. Cette interdiction, toujours en vigueur après plusieurs mois, aurait été imposée par le ministère iranien du Renseignement.
Arrêtée en 2007 et condamnée en 2009, Zeinab avait d’abord été condamnée à mort pour “moharebeh” (inimitié envers Dieu) en raison de liens présumés avec un groupe d’opposition, ainsi qu’à un an de prison pour “sortie illégale du territoire”. Sa peine capitale a été confirmée en appel et par la Cour suprême, avant d’être commuée en prison à perpétuité.
Lors de son arrestation et de son interrogatoire, Jalalian a été soumise à des actes de torture brutaux : coups sur la plante des pieds, coups dans l’abdomen, tête projetée contre les murs, et menaces de violences sexuelles — des traitements qu’elle a décrits en détail.
Aujourd’hui, Zeinab Jalalian entame sa 18e année de détention. Elle reste l’une des femmes prisonnières politiques les plus lourdement condamnées et les plus anciennement incarcérées en Iran.

Raheleh Rahemipour : Une prisonnière de 72 ans atteinte d’une tumeur cérébrale
Raheleh Rahemipour, 72 ans, est détenue à la prison d’Evin dans un état de santé critique. Elle souffre de plusieurs maladies graves — dont une tumeur au cerveau, des troubles cardiaques, de l’hypertension et du diabète — mais se voit refuser tout accès aux soins médicaux appropriés, malgré les alertes lancées par l’Organisation de médecine légale sur la nécessité urgente d’un traitement.
Son état physique est devenu si fragile qu’elle souffre fréquemment de fatigue extrême et de malaises inquiétants, au point d’alarmer ses codétenues. Malgré cela, les autorités judiciaires ont non seulement refusé son transfert à l’hôpital, mais aussi rejeté sa demande de libération conditionnelle.
Les évaluations médicales ont clairement indiqué que Mme Rahemipour n’était pas en état de supporter la détention, et que son maintien dans l’environnement stressant de la prison d’Evin mettait sa vie en grave danger. Pourtant, selon plusieurs témoignages, le bureau du procureur lui aurait déclaré que sa participation à des protestations en détention empêchait toute révision de son dossier, et qu’aucune mesure ne serait prise concernant ses soins.
Raheleh Rahemipour avait été arrêtée une première fois en novembre 2019, puis relâchée.
En 2020, le tribunal révolutionnaire de Téhéran l’a condamnée à six ans de prison. Elle a été de nouveau arrêtée en novembre 2023, après s’être rendue au bureau du procureur d’Evin, puis transférée directement en détention pour purger sa peine.

Varisha Moradi : Chirurgie vitale de la colonne et du cou refusée
Varisha Moradi, prisonnière politique kurde de 40 ans condamnée à mort, est actuellement détenue à la prison d’Evin à Téhéran. Elle se voit continuellement refuser l’accès à des soins médicaux vitaux, en dehors des murs de la prison.
Elle souffre de graves pathologies vertébrales, notamment de hernies discales cervicales et lombaires, nécessitant une intervention chirurgicale urgente.
Malgré les recommandations formelles d’un spécialiste, qui a exigé une opération immédiate il y a plus de cinq mois, les autorités carcérales font obstacle à toute prise en charge. Elle reste en proie à des douleurs constantes et à un risque médical croissant.
Varisha a été violemment enlevée le 1er août 2023 par des agents du ministère du Renseignement iranien. Elle a été battue avec brutalité avant d’être transférée — sans aucun examen médical préalable — dans un centre de détention.
Pendant cinq mois, elle a été maintenue à l’isolement dans la tristement célèbre section 209 de la prison d’Evin, sous contrôle des services de renseignement, avant d’être transférée au quartier des femmes le 26 décembre 2023.
Sa souffrance persistante, aggravée par le refus de soins médicaux, illustre la brutalité du traitement infligé aux prisonniers politiques en Iran — en particulier ceux issus de minorités ethniques comme les Kurdes.
Dans le cas de Varisha Moradi, la négligence médicale systématique ne constitue pas seulement une punition supplémentaire, mais bien une menace calculée contre sa vie.

Hoda Mehrganfar : Privée de soins médicaux alors qu’elle est malade à la prison d’Adelabad
Plus de 200 jours se sont écoulés depuis l’arrestation de Hoda Mehrganfar, ingénieure en électronique de 35 ans et prisonnière politique, dont la santé se dégrade continuellement dans la prison d’Adelabad à Chiraz, alors qu’elle reste plongée dans une situation juridique floue.
Mehreganfar a été arrêtée à 5 heures du matin le 22 octobre 2024 lors d’une perquisition des forces de sécurité à son domicile à Zarqan, dans la province de Fars. Elle a été emmenée avec son père sans qu’aucun mandat judiciaire ne leur soit présenté. Depuis, elle est détenue sans pouvoir accéder à l’avocat de son choix, sans accusation formelle ni procès.
Avant son arrestation, Hoda avait subi une intervention chirurgicale et nécessitait un suivi médical. Toutefois, les conditions insalubres du quartier des femmes de la prison d’Adelabad ont gravement compromis sa convalescence. Elle aurait contracté des infections fongiques et d’autres maladies de peau, et son état général est décrit comme se dégradant en raison de l’absence de soins médicaux adéquats.

Arghavan Fallahi, 25 ans : Une maladie chronique et l’absence de médicaments
Arghavan Fallahi, âgée de 25 ans et résidente de Parand, souffre d’une maladie chronique et se voit refuser l’accès aux médicaments essentiels dont elle a besoin depuis son arrestation.
Ayant été libérée de prison quelques mois auparavant, elle a été de nouveau arrêtée le 25 janvier 2025, lorsque les forces de sécurité ont fait une descente à son domicile. Elle a été transférée à la section 209 de la prison d’Evin, centre de détention tristement célèbre contrôlé par le ministère du Renseignement.
Son père, Nasrollah Fallahi — lui-même emprisonné à Evin — n’a aucune information sur l’état de santé ou la localisation exacte de sa fille, ce qui plonge toute la famille dans l’angoisse et l’incertitude.

Marzieh Ghafarizadeh : Une prisonnière politique atteinte d’un cancer
Marzieh Ghafarizadeh, prisonnière politique détenue depuis février 2025, reste enfermée indéfiniment dans le quartier des femmes de la prison d’Evin. Bien qu’une libération sous caution ait été décidée, les autorités judiciaires refusent de l’accepter, l’empêchant ainsi de recouvrer la liberté.
Mme Ghafarizadeh lutte actuellement contre un cancer et suit un traitement en détention. Le maintien de son incarcération dans des conditions carcérales dures menace d’aggraver considérablement son état de santé déjà fragile.
Militante de longue date, active depuis les années 1980, Marzieh a consacré plus de 25 ans au travail bénévole dans les quartiers défavorisés du sud de Téhéran. Membre active de l’association culturelle « 13 Aban », elle a joué un rôle majeur dans l’aide apportée aux femmes enceintes, aux mères allaitantes et aux enfants.
Son cas incarne non seulement une tragédie personnelle, mais aussi le visage d’une répression persistante contre les défenseurs des droits humains en Iran.
Soyons la voix des femmes iraniennes dans les prisons de Khamenei
Le régime clérical impitoyable persiste à refuser aux prisonnières politiques l’accès aux traitements médicaux et ne leur accorde même pas les permissions de soins les plus élémentaires. Cette torture lente et délibérée, pratiquée de façon systématique, constitue une violation flagrante des droits humains.
La Commission des femmes du Conseil national de la Résistance iranienne appelle d’urgence le Conseil des droits de l’homme de l’ONU, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme, le Rapporteur spécial de l’ONU, ainsi que toutes les organisations de défense des droits humains — y compris l’Union européenne, ses États membres, la commission des droits de l’homme du Parlement européen, la commission des droits des femmes et de l’égalité des genres — et tous les gouvernements européens et internationaux à prendre des mesures immédiates pour la libération inconditionnelle des prisonnières politiques malades.
La souffrance de ces femmes appelle notre action.