Quand être une femme est un crime, et gagner son pain un combat
Alors que les conditions de vie quotidiennes se dégradent pour l’ensemble de la population et que la répression d’État s’intensifie, la situation des femmes chefs de famille, l’un des groupes les plus vulnérables de la société iranienne, continue de se détériorer sur tous les plans.
Le nombre de femmes qui assurent seules la subsistance de leur famille est en augmentation. Souvent, ces femmes assument ce rôle à la suite d’un divorce, du décès de leur conjoint, ou par refus de se marier sous les lois discriminatoires qui régissent la famille et la société en Iran. Ce faisant, elles portent l’entière responsabilité économique et éducative du foyer. Elles affrontent sur cette voie des difficultés croissantes d’ordre économique, social et psychologique. De plus, elles sont privées de toute protection sociale de base et exposées à des formes de violence souvent invisibles.
Vue d’ensemble statistique
Comme pour bien d’autres sujets sous le régime clérical, les statistiques précises concernant les femmes chefs de famille sont volontairement dissimulées. Selon le site Donya-e-Eqtesad (3 mai 2025), leur nombre dépasse les 6 millions en Iran, dont la moitié ne bénéficie d’aucune assurance. Les médias d’État évoquent occasionnellement la croissance annuelle de cette population vulnérable.
Cette augmentation résulte de divers facteurs : difficultés économiques, pauvreté, chômage, ou incapacité des hommes à assurer le soutien financier — conduisant souvent au divorce ou à l’émigration masculine. En outre, les décès dus aux accidents, aux assassinats d’État et aux arrestations, ainsi que la pandémie de COVID-19 de ces dernières années, ont contribué à l’augmentation du nombre de femmes devant subvenir seules aux besoins de leur famille.
De nombreuses jeunes femmes choisissent aussi de ne pas se marier en raison des lois archaïques et discriminatoires du régime clérical et du pouvoir absolu accordé aux hommes dans la structure familiale. Bien que ce choix puisse les protéger de certaines formes de violence et de contraintes, il leur impose à la place un lourd fardeau financier et émotionnel.

Défis et préjudices subis par les femmes chefs de famille
Pression économique et professionnelle
Beaucoup de femmes chefs de famille n’ont pas accès à un emploi formel et sont contraintes d’accepter des « emplois non assurés, instables ou faiblement rémunérés », comme le travail domestique, la petite épicerie ou la vente ambulante. Leur préoccupation principale est de gagner de quoi subvenir aux besoins essentiels et à l’éducation de leurs enfants.
Les ateliers de couture, de tissage de tapis, de conditionnement ou de vente — des secteurs qui emploient souvent des femmes chefs de famille — le font précisément parce que ces femmes, désespérées, acceptent des salaires extrêmement bas.
Le 16 janvier 2025, le site d’État Khabar Online rapportait que le coût mensuel minimum de la vie dans les petites villes avait atteint 28 millions de tomans (environ 665 USD), un chiffre en constante augmentation.
Gholamreza Taj-Gardoon, chef de la Commission parlementaire du budget et de la planification du régime, a récemment déclaré : « Dans un atelier de tissage de tapis d’une ville, 40 à 50 femmes âgées travaillaient. Leurs mains étaient gonflées et blessées, et elles ne gagnaient que de 1,9 à 3 millions de tomans (soit 45 à 70 USD) par mois, sans aucune assurance. » (Site d’État Bazaar Analysis – 7 juin 2025)
Ces rares aperçus de leur vie — révélés souvent à l’occasion de querelles internes au sein du régime — ne montrent que la partie émergée de l’iceberg en ce qui concerne les souffrances des femmes chefs de famille.

Vulnérabilité généralisée
Outre la pauvreté, les femmes chefs de famille sont confrontées à des risques physiques, psychologiques et sociaux. Soudabeh Najafi, membre du Conseil municipal de Téhéran, a alerté sur le fait que le manque d’opportunités professionnelles et de soutien social expose ces femmes à l’anxiété, la dépression et un profond sentiment d’abandon.
Le fait de vivre dans des zones défavorisées ou marginalisées — où les services urbains et l’accès aux soins, à l’éducation et aux centres culturels sont minimes — les rend encore plus vulnérables. (Agence IRNA – 8 juin 2025)
Le fardeau physique est également lourd. Lors d’une session récente de l’Organisation de bienfaisance du régime consacrée aux femmes chefs de famille, Javad Hosseini, son président, a déclaré que 53 000 femmes âgées vivant seules avaient été recensées dans tout le pays.
Maryam Khakrangin, cheffe par intérim du Bureau de la femme et de la famille de l’organisation, a indiqué que le cancer devenait de plus en plus courant parmi les femmes chefs de famille, expliquant : « C’est prévisible, car les populations vulnérables ont tendance à retarder les traitements. »
Elle a ajouté : « La situation pourrait devenir critique, car ces femmes sont responsables de 212 000 enfants, et si quelque chose leur arrive, nous serons confrontés à une vague d’enfants orphelins. »
Renverser le régime : seul espoir de salut
Les femmes chefs de famille sont le symbole éclatant de l’oppression systémique exercée par le régime clérical sur le peuple iranien. Aborder en profondeur les souffrances qu’elles endurent nécessiterait un discours long et détaillé. Comme le reste de la population, ces femmes ne vivent plus que dans un seul espoir : le renversement du régime clérical, car sous sa domination, aucune amélioration de leur situation n’est envisageable.