Alors que le monde, à l’occasion de la Journée internationale de l’éradication de la pauvreté (17 octobre), met l’accent sur la justice sociale, la dignité humaine et le droit à une vie décente, l’Iran, sous l’ombre d’un régime prédateur et discriminatoire, est devenu le théâtre d’une pauvreté omniprésente et d’une privation humaine généralisée.
Pays doté d’immenses ressources pétrolières, gazières, minières et humaines, l’Iran voit pourtant la majorité de ses citoyens peiner à satisfaire leurs besoins les plus élémentaires. La pauvreté en Iran n’est pas le résultat d’une rareté des ressources, mais la conséquence de structures dysfonctionnelles, d’une corruption institutionnalisée et de politiques économiques et politiques qui détournent la richesse nationale du peuple pour la canaliser vers la répression et des projets militaires.
Bien que la pauvreté touche l’ensemble du pays, son visage féminin est catastrophique:
Les femmes chefs de ménage, principales pourvoyeuses de leurs foyers, subissent des discriminations économiques, sociales et gouvernementales plus sévères que tout autre groupe. Elles vivent dans une société où l’accès à l’emploi, aux ressources financières et au soutien social leur est systématiquement refusé. Ces femmes doivent lutter non seulement contre les pressions économiques, mais aussi contre les barrières quotidiennes de discrimination, l’inégalité légale et l’absence de sécurité sociale.
Pour les femmes chefs de ménage, la pauvreté ne se limite pas à l’absence de revenus ; elle signifie être exclue des processus de décision, ignorée dans les politiques de soutien et vivre dans un état permanent d’instabilité et d’angoisse.

État général de la pauvreté en Iran
Plus de 80 % des ménages iraniens vivent sous le seuil de pauvreté. Environ 60 % de la population vit sous ce seuil, dont 50 % en pauvreté absolue. (Eghtesad News, octobre 2024)
60 % des personnes sous le seuil de pauvreté ne peuvent pas consommer 2 100 calories par jour, soit plus de 50 millions de personnes pauvres en Iran. (Rokna – 9 septembre 2024)
Situation des femmes chefs de ménage
Dans un pays où la pauvreté a englouti une grande partie de la population et où des millions vivent sous le seuil de pauvreté, quelle est la situation des femmes qui, depuis des années, sont structurellement discriminées et forcées d’assumer le rôle de pourvoyeuse de famille ?
Les femmes chefs de ménage, confrontées à une inflation galopante, à l’absence de soutien social et à un marché du travail discriminatoire, sont plus exposées à l’effondrement que tout autre groupe social. Pour elles, la pauvreté n’est pas une crise temporaire, mais une réalité chronique et auto-reproductrice : pauvreté financière, mais aussi pauvreté de sécurité, pauvreté de soutien et pauvreté d’espoir. Dans un pays où les statistiques officielles n’incluent même pas les femmes chefs de ménage, un drame silencieux se joue dans leur vie, ignoré par les autorités.
Les données officielles concernant les femmes chefs de ménage en Iran ne sont ni transparentes ni précises, et la publication des statistiques a été interrompue ou incomplète ces dernières années.
Plus de 6 millions de femmes chefs de ménage vivent en Iran, dont la moitié n’est pas assurée. (Donya-e Eqtesad, 3 mai 2025)
Si l’on considère que le pourcentage de femmes chefs de ménage est resté à 12 % depuis 2011, avec une population actuelle de 85 millions, il y aurait au moins 10 millions de femmes chefs de ménage non reconnues ni soutenues par le gouvernement. Pourtant, les responsables du régime ont reconnu que plus de 60 300 personnes étaient ajoutées chaque année à cette population au cours des dix dernières années. (Shahrvand, 10 juillet 2018)
Bijan Abdolkarimi, ancien professeur universitaire, rapporte que rien qu’entre 2017 et 2019, plus de 10 millions de personnes sont tombées sous le seuil de pauvreté. Cette tendance affecte directement les femmes chefs de ménage, qui supportent le fardeau économique de leur famille tout en étant privées du moindre soutien social. (Setareh Sobh, 17 septembre 2025)
52 % des femmes chefs de ménage n’ont ni assurance ni retraite, et même celles ayant un emploi officiel vivent dans une angoisse permanente face aux crises sociales et économiques. (Eqtesad 24, 21 juin 2025)
70 % de la population économiquement inactive est constituée de femmes, ce qui signifie que les travailleuses, femmes au foyer ou vendeuses de rue subissent une pression supplémentaire et une pauvreté généralisée. Beaucoup de femmes chefs de ménage acceptent des emplois extrêmement difficiles et informels, avec de bas salaires, des contrats vides ou sans couverture sociale. (Donya-e Eqtesad, 28 décembre 2024)

Défis et préjudices
1. Pression économique et professionnelle
- La plupart des femmes chefs de ménage n’ont pas accès aux marchés du travail formels et sont contraintes d’accepter des emplois non assurés, instables et faiblement rémunérés, tels que les ateliers de couture, le tissage de tapis, l’emballage ou la vente ambulante. (Tahlil-e Bazaar, 7 juin 2025)
- Les femmes chefs de ménage se tournent souvent vers des emplois informels, la vente ambulante, de petits ateliers ou même la vente de leurs cheveux. Une vendeuse témoigne : « J’étais au chômage et je n’avais aucun moyen de payer le traitement de mon fils. J’ai donc dû vendre mes cheveux, mais l’argent n’a même pas suffi pour un mois. » (Khabar Online, 7 avril 2025)
- Le 11 juillet 2025, l’agence de presse ILNA a rapporté que les femmes vendeuses de rue et celles travaillant dans l’informel ne bénéficient d’aucune protection légale ni assurance, et risquent à tout moment le harcèlement des agents gouvernementaux, la saisie de leurs marchandises ou l’arrestation. Cette situation accroît leur pression économique et psychologique.
- Le coût minimum de la vie pour un ménage dans les petites villes a été annoncé à 28 millions de tomans, (Khabar Online, 16 janvier 2025) tandis que les femmes chefs de ménage travaillant dans des ateliers gagnent entre 1,9 et 3 millions de tomans et restent non assurées.
- Beaucoup de femmes se tournent vers des moyens de subsistance non conventionnels, comme la vente d’organes, le travail sexuel ou le transport de lourdes charges à travers les frontières (Koulbar), pour couvrir leurs besoins. (Etemad, 15 juin 2024)
2. Absence de soutien social et légal
Alors même que le nombre de femmes chefs de ménage augmente, seulement 283 500 d’entre elles bénéficient d’une couverture par l’Organisation de protection sociale. (Iran Newspaper, 18 août 2025)
Témoignages de femmes chefs de ménage
- Sanaz dirige un commerce de vente de cosmétiques et de vêtements en ligne pour subvenir à ses besoins et à ceux de sa fille. Son revenu mensuel n’était que de 2 millions de tomans et, en raison de problèmes d’internet et d’un ralentissement du marché, il était inférieur à la moitié de son loyer. (ILNA, 11 juillet 2025)
- Shiva, titulaire d’une licence en littérature, travaille comme conductrice de taxi en ligne et vit avec sa fille de deux ans dans une pièce exiguë. Elle n’est pas assurée et ses revenus sont irréguliers. (ILNA, 11 juillet 2025)
- Zahra vend des marchandises dans le métro. Chef d’une famille de quatre personnes, elle n’a aucune assurance. Son unique revenu provient de la vente ambulante et, le mois dernier, elle a gagné environ 3 millions de tomans, un montant inférieur à la moitié de son loyer. (ILNA, 11 juillet 2025)

De la pauvreté à l’espoir : le chemin vers la fin de l’injustice et de la pauvreté féminine
Au milieu de cette obscurité faite de pauvreté et d’inégalités, née de décennies de pillage et de cupidité, de corruption et de discrimination exercée par le régime clérical contre les femmes, les femmes iraniennes tiennent encore debout. Celles qui portent à la fois le fardeau de la subsistance familiale et la discrimination structurelle sur leur corps et leur esprit luttent chaque jour pour la vie, la dignité et un avenir auquel elles puissent croire.
Mettre fin à cette injustice n’est possible qu’avec le renversement du régime clérical qui, depuis des années, a réduit au silence la voix des femmes. Malgré toutes les pressions, les femmes iraniennes prouvent chaque jour que la vie peut être reconstruite. Elles se tiennent en première ligne des protestations, exigeant la chute du régime et l’instauration de la justice.
La communauté internationale doit entendre leurs voix et se tenir à leurs côtés.
 
			 
    	 
			




















