Difficultés invisibles et défis sociaux dans une région côtière négligée d’Iran
À la périphérie de Tchabahar, une ville côtière en Iran, les cicatrices cachées de la pauvreté, de la dépendance et des catastrophes environnementales deviennent de plus en plus visibles. Ces difficultés, qui affectent de manière disproportionnée les migrants ruraux — en particulier les femmes migrantes en quête d’une vie meilleure — ont été aggravées par une négligence chronique et un manque de supervision, donnant lieu à des défis sociaux et sécuritaires croissants.
L’article suivant est un extrait d’un document publié par l’agence de presse d’État ILNA le 23 mars 2025.
Migration vers la ville : des rêves ruraux aux cauchemars urbains
Tchabahar, autrefois considérée comme un phare d’opportunités économiques en Iran en raison de sa position en tant que seul port océanique du pays, abrite aujourd’hui des dizaines de milliers de migrants ruraux, dont beaucoup viennent des zones frappées par la sécheresse du Sistan-et-Baloutchistan. Poussés par la promesse de meilleures opportunités, ces migrants se retrouvent embourbés dans la pauvreté, luttant contre un réseau complexe de problèmes en marge de la ville.
La crise environnementale est au cœur des problèmes de migration à Tchabahar. De nombreux migrants viennent de régions rurales dévastées par la sécheresse, où ils gagnaient autrefois leur vie grâce à l’agriculture et à l’élevage. Alors que des sources d’eau comme les sources naturelles et les qanats se sont asséchées, ils ont été contraints d’abandonner leurs moyens de subsistance et de chercher refuge en ville.
Cependant, les promesses d’une vie meilleure à Tchabahar se sont souvent révélées fausses. Le manque de planification et de ressources a rendu presque impossible pour ces migrants ruraux de trouver un logement stable. À la place, ils se sont tournés vers des établissements informels où les infrastructures de base sont soit inexistantes, soit mal entretenues. En conséquence, ces zones restent piégées dans un cycle de pauvreté et de négligence, incapables d’échapper aux effets de la crise environnementale.
L’aggravation de la crise sociale dans les bidonvilles surpeuplés
Les périphéries de Tchabahar, marquées par des bidonvilles et des abris mal construits, dressent un tableau sombre d’un système qui échoue à son peuple.
Ces établissements informels, qui abritent près de 70 000 migrants, souffrent de conditions de surpeuplement, d’un accès insuffisant aux services de base et d’un manque d’infrastructures efficaces. Avec 65 % de la population de Tchabahar — soit 112 000 habitants — vivant en dessous du seuil de pauvreté, c’est une ville où l’inégalité sociale est frappante et inévitable.
Vivant dans ces zones surpeuplées, de nombreuses personnes endurent une vie dominée par la toxicomanie, avec une présence bien trop commune de substances telles que l’héroïne, la méthamphétamine et la crystal meth. Les habitants de ces zones, y compris les jeunes et les femmes migrantes, sont souvent pris dans un cycle de dépendance qui a des conséquences dévastatrices sur leur santé, leurs familles et leurs communautés.
La dégradation sociale dans les bidonvilles de Tchabahar s’accompagne également de risques sanitaires environnementaux majeurs.
Des eaux usées à ciel ouvert coulent dans les rues, rendant la vie insupportable pour les résidents. Les enfants jouent dans ces environnements pollués, et leur santé est mise en danger par des maladies liées aux conditions de vie insalubres. L’absence d’électricité, associée à des fils électriques exposés, ne fait qu’ajouter au danger, transformant ces quartiers en un véritable champ

Les luttes des femmes dans les marges de Tchabahar
Parmi les plus touchées par ces conditions difficiles figurent les femmes de Tchabahar. La faim, l’analphabétisme, et la pression sociale de vivre dans une pauvreté extrême ont laissé de nombreuses femmes migrantes en lutte pour survivre.
Un exemple est celui de Setareh, une femme de 29 ans devenue cheffe de famille après que son mari a été impliqué dans un conflit tribal et condamné à mort.
Setareh doit s’occuper de sa fille de trois ans et demi, qui souffre d’une maladie chronique. Sans revenu stable, Setareh cumule plusieurs emplois, notamment le ménage chez des particuliers et la broderie, pour joindre les deux bouts. Pourtant, même avec tous ces efforts, elle parvient à peine à payer son loyer, sans cesse repoussé de mois en mois, ce qui laisse peu d’espoir pour l’avenir.
Son histoire n’est pas unique. Des milliers de femmes à Tchabahar font face à des luttes similaires, prises entre le désespoir de la pauvreté et les dures réalités d’une société où les opportunités pour les femmes sont limitées, en particulier pour celles vivant dans les zones marginalisées.

Supervision gouvernementale
Le gouvernement local a été critiqué pour son incapacité à traiter le problème croissant des établissements informels et le manque de services adéquats pour les communautés marginalisées. Malgré la conscience de la gravité du problème, les responsables locaux n’ont pas mis en œuvre de stratégies efficaces pour gérer la migration et intégrer ces nouveaux migrants dans le tissu urbain de la ville.
Certains militants soulignent que le ministère de l’Agriculture et les autorités locales ont négligé les besoins des agriculteurs et des éleveurs touchés par la sécheresse persistante. Au lieu de soutenir ces communautés dans leurs foyers d’origine en leur fournissant les ressources nécessaires, comme de l’eau pour le bétail et les cultures, beaucoup ont été laissés sans aide, ce qui a contribué à la crise de la migration urbaine à Tchabahar.
L’absence de planification pour les nouveaux migrants a entraîné une montée spectaculaire du chômage, de la criminalité et de la toxicomanie, ce qui a aggravé l’instabilité sociale. Sans supervision adéquate ni investissement dans un développement durable, les zones périphériques de Tchabahar deviennent de plus en plus difficiles à gérer, créant une situation volatile qui menace l’avenir de la ville.

Le besoin d’un changement fondamental
La situation à Tchabahar, comme dans de nombreuses autres villes d’Iran, met en évidence une réalité tragique : la négligence et la mauvaise gestion du régime iranien ont laissé d’innombrables citoyens, en particulier les pauvres des zones rurales, piégés dans un cycle de pauvreté, de déplacement et de désespoir.
L’incapacité du régime à traiter les causes profondes de la migration la sécheresse, l’effondrement économique et la destruction de l’environnement n’a fait qu’empirer les conditions des migrants qui cherchent une vie meilleure dans des centres urbains comme Tchabahar.
La mainmise rigide du régime sur le pouvoir, axée sur le maintien du contrôle plutôt que sur l’amélioration des conditions de vie de ses citoyens, a conduit à une situation insoutenable et dangereuse pour des millions d’Iraniens.
Le système même qui a créé et aggravé les souffrances des habitants de Tchabahar et à travers l’Iran ne se corrigera pas de lui-même. La seule voie pour que les habitants de Tchabahar et de l’Iran prospèrent, qu’ils échappent à l’étreinte de la pauvreté, de la violence et de la destruction environnementale, est que le régime soit démantelé et remplacé par un gouvernement qui sert réellement le peuple, respecte sa dignité, et donne la priorité au développement durable et à la justice sociale.
Les habitants de Tchabahar méritent un avenir où leur dur labeur et leur résilience peuvent mener à une réelle prospérité, et non à une vie d’exploitation et de négligence. Tant que le régime iranien ne sera pas tenu responsable de ses actes et remplacé par un gouvernement qui place les besoins de son peuple en priorité, ce cycle de souffrance se poursuivra.