Comment les femmes iraniennes supportent le lourd fardeau d’une crise qui s’aggrave
La crise de l’eau en Iran a depuis longtemps dépassé le cadre d’un simple problème environnemental : elle s’est transformée en une véritable catastrophe humanitaire, écologique et économique.
Si, à l’origine, elle semblait due à la sécheresse et à la baisse des précipitations, ses causes profondes résident ailleurs : dans la corruption enracinée et la mauvaise gestion qui gangrènent l’appareil du pouvoir. Tant que ces causes systémiques ne seront pas traitées, le présent et l’avenir du pays resteront menacés.
De nombreux chercheurs et observateurs internationaux estiment que 70 à 80 % de la crise actuelle résultent de la mauvaise gestion, de politiques non durables, du manque de transparence et de la corruption. Comme le résume cet article : « La crise de l’eau en Iran n’est pas une crise de ressources, mais une crise de décisions. Des décisions qui ont rendu la terre plus assoiffée et l’avenir plus sombre. Cette crise, tout comme l’érosion de la confiance du public envers les autorités, est le symptôme d’un échec structurel et de gouvernance. » (Newsweek, 1er août 2025 ; The Times, 8 décembre 2022 ; Reuters, 27 avril 2021)
Des rapports de terrain venus de plusieurs quartiers de Téhéran font état d’une chute alarmante de la pression de l’eau, à tel point que même les habitants des rez-de-chaussée sont privés d’eau potable.
Dans une déclaration publique, la Compagnie régionale des eaux de Téhéran a appelé les habitants à installer des surpresseurs domestiques afin de « renforcer la pression de l’eau », transférant ainsi la responsabilité de l’approvisionnement sur les ménages, dont beaucoup n’ont pas les moyens d’acquérir un tel équipement. (Ebtekar, 21 juillet 2025)
Reza Hajikarim, président de la Fédération de l’eau, a reconnu : « Le “jour zéro” de Téhéran, le jour où les immeubles sont totalement privés d’eau, est arrivé depuis longtemps. Pourtant, la ville détient toujours le record mondial d’affaissement des sols, provoqué par le pompage excessif des nappes phréatiques. »
(Jahan-e Sanat, 6 août 2025)
Le double fardeau des femmes
La catastrophe de la pénurie d’eau a des conséquences sociales et économiques profondes touchant des millions de vies. Les coupures prolongées et non planifiées ont paralysé la vie rurale : l’agriculture s’est effondrée, le bétail meurt de soif, et de nombreuses familles n’ont même plus accès à l’eau potable.
Les signes de cette crise apparaissent dans les relations et l’économie familiales, la santé physique et mentale, ainsi que dans l’augmentation des migrations internes.
En raison de leurs responsabilités traditionnelles, s’occuper des enfants et des personnes âgées, préparer les repas, assurer l’hygiène du foyer, entretenir les potagers et le bétail, les femmes subissent le plus lourd fardeau.
Ce sont elles qui, du matin au soir, doivent gérer les conséquences du manque d’eau. Le stress psychologique provoqué par les coupures répétées, les longues files d’attente pour obtenir de l’eau, la dégradation de l’hygiène des enfants et des femmes, ainsi que la hausse du prix de l’eau, les privent d’éducation, de santé et de moments de répit.
Ces conditions favorisent la dépression, l’anxiété chronique, l’aggravation des tensions familiales et la montée des violences domestiques.
Pénurie d’eau et violences faites aux femmes
Au-delà des difficultés domestiques, la pénurie d’eau bouleverse les économies locales et anéantit les moyens de subsistance les zones rurales, entraînant une pauvreté généralisée.
Or, la pauvreté alimente les mariages précoces, les violences domestiques et diverses formes de détresse sociale.
« L’une des principales causes de la violence contre les femmes, c’est la pauvreté », souligne Jame’e 24 (31 juillet 2021).
Salomeh poursuit : « À mesure que l’économie de notre ville s’est effondrée, l’éducation et la santé ont décliné, et les mariages précoces ont augmenté. Imaginez une fille de 15 ou 16 ans, déjà mariée, confrontée à la crise de l’eau, qui tombe enceinte, accouche et doit s’occuper de son bébé dans ces conditions. » (Radio Zamaneh, 17 octobre 2024)
Ce phénomène est visible dans toutes les régions d’Iran touchées par la pénurie d’eau, notamment dans les zones rurales du Sistan-et-Baloutchistan et du Khorassan du Sud, où la crise hydrique favorise l’abandon scolaire, les mariages forcés et la négligence de la santé et de l’hygiène des femmes. (Site Bahre Vari, 17 décembre 2024)
Les femmes à l’avant-garde des protestations populaires
La pénurie d’eau, facteur déclencheur, a exacerbé les tensions sociales en Iran à un niveau sans précédent. Ces manifestations se distinguent par la présence particulièrement active des femmes.
Les grandes mobilisations au Khouzistan, apparues ces dernières années à cause du manque d’eau et de l’assèchement des zones humides, se sont poursuivies à l’été 2025.
Plutôt que de résoudre le problème, le régime a qualifié les manifestants de « fauteurs de troubles » et, par la force militaire, tué ou arrêté des dizaines de personnes. (Euronews, 13 mars 2025)
Des protestations similaires ont eu lieu entre mai et août 2025 dans plusieurs villes iraniennes, notamment à Chahr-e Kord et dans diverses provinces du sud et du centre, avec des slogans tels que : « De l’eau, de l’électricité, la vie, c’est notre droit incontestable. » (Wikipedia, 11 août 2025)
À Téhéran, les habitants de Nassimchahr sont descendus dans la rue le 21 juillet pour protester contre la coupure totale de l’eau pendant trois jours, en pleine canicule.
Les 23 et 24 juillet, Téhéran et Eslamchahr ont connu des manifestations antigouvernementales en réaction aux coupures d’eau et d’électricité.
Le 23 juillet, dans plusieurs quartiers de la capitale, les habitants ont exprimé leur colère face à la situation catastrophique du pays avec des slogans tels que :
« À bas Khamenei, malédiction à Khomeiny », « Toutes ces années de crimes, à bas le régime », « À bas le dictateur ».
Le lendemain, à Eslamchahr, le slogan « À bas Khamenei » a résonné en réponse aux pannes répétées d’électricité.
Des protestations similaires ont également été signalées le même jour à Marvdacht et Torbat Jam.
Le vendredi 25 juillet, les habitants de Barzanoun, à Nichapour, ont aussi bloqué la route pour protester contre le manque d’eau.
Les villageois ont déclaré : « S’il n’y a pas d’eau et que les autorités du régime ne répondent pas, alors la route ne doit pas rester ouverte non plus ! » (Secrétariat du Conseil national de la Résistance iranienne, 25 juillet 2025)
Mot de la fin
La crise que l’on désigne aujourd’hui sous le terme de déséquilibre hydrique n’est ni soudaine ni le fruit du changement climatique ; elle résulte de l’accumulation de la corruption et des politiques imposées au peuple, intrinsèquement liées à la nature même d’une dictature religieuse.
La crise de l’eau n’est qu’une des innombrables raisons expliquant l’instabilité politique et le manque de légitimité du régime des mollahs.
Kaveh Madani, directeur de l’Institut de l’eau, de l’environnement et de la santé à l’Université des Nations unies, déclare : « Si nous prêtons attention à notre pays, nous pouvons en observer les signes d’une maladie grave, difficile à soigner, une infection sévère, voire un cancer, touchant différents secteurs.
Un jour, nous ne pouvons pas respirer à cause de la pollution de l’air à Téhéran ; un autre jour, c’est à cause des tempêtes de poussière ; puis vient la situation de l’eau, l’état d’un établissement d’enseignement, le prix du dollar, de l’économie, de la Bourse ou de l’industrie.
Si nous regardons de près, les signes de crise apparaissent dans tous les domaines. Beaucoup de ces problèmes ont des causes communes. Nous devons reconnaître notre échec. » (Etemad, 26 juillet 2025)
Les protestations répétées au Khouzistan, à Ispahan et dans d’autres provinces, déclenchées par les pénuries d’eau, reflètent la colère croissante du peuple face à l’incompétence du régime.
La répression de ces manifestations, qui a entraîné la mort de plusieurs protestataires, n’a fait qu’alimenter la fureur populaire et fragiliser davantage les fondations du pouvoir en place. Les signes d’un soulèvement national visant à renverser ce régime illégitime apparaissent désormais partout.
Ce qui préoccupe aujourd’hui la communauté internationale et les consciences éveillées, c’est d’aider le peuple iranien dans cette épreuve cruciale.
Reconnaître l’alternative organisée du peuple iranien, qui lutte depuis des décennies pour la liberté, accélérera non seulement la libération du pays de la dictature, mais contribuera aussi à la paix et à la coopération dans le monde libre.
